Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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l'honneur et la gloire de la patrie exigent. » (4) Elle va jusqu'à charger Grimm d’avoir à ce sujet une conversation avec M. de Saint-Priest. C’est que ses intérêts, avoue-t-elle, en seraient joliment arrangés ! Nous avons dès lors l'explication de l’empressement qu’elle met à donner cet avis !

Pendant toute la période révolutionnaire, Catherine donnera des conseils, et se plaindra qu'ils ne soient pas suivis. À l'entendre ils auraient fait merveille. Nous n’en sommes pas convaincus. En 1792, en 1793 elle répétera cent fois aux Princes et aux Emigrés de prendre une ou deux bicoques quelconques au lieu de s’entêter contre Strasbourg ; à son avis, la bicoque prise, ils marcheront tout droit sur Paris, et la France sera conquise à la cause de la royauté. En 1789 elle pousse Louis XVI à user, pour guérir son peuple, du dérivatif des préoccupations extérieures. Petits moyens, et qui, outre leur impossibilité en un pareil moment, n'eussent aucunement enrayé la Révolution |! Les Etats-Généraux étaient là pour empêcher la royauté de s'engager dans la politique européenne. La France en avait assez avec ses embarras intérieurs. Si Catherine avait été à la place de Louis XVI, — ou à celle du comte d'Artois, — peutêtre aurait-elle eu quelque idée géniale qui eût fait momentanément fléehir la marche fatale des événements; mais plus vraisemblablement, avec une autre fermeté et une autre décision que Louis XVI elle eut cherché à endiguer la Révolution par les mêmes moyens, et celle-ci l’eut emport ée.

(1) Lettre à Gri mm du 19 mars 1789.