Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...
XII
Tout en rêvant au bonheur de revenir à son tranquille château d’Ettlingen, M. de Butré, ou plutôt le citoyen Butret, — car il ne s’appellera plus autrement désormais, — n’avait pas vécu dans une inaction complète pendant les deux années qui s’écoulèrent après son retour à Strasbourg. Il semblerait même qu'il ait eu peu de confiance, au fond, dans l'issue de ses démarches ; dans le cas contraire, s’expliqueraient difficilement-ses acquisitions d'immeubles en Alsace. Soit qu’il fût pressé d'utiliser, avant leur dépréciation absolue, ce qui lui restait de « valeurs nationales » ‘ en dépôt chez son banquier de Strasbourg, soit qu'il ait réussi à faire quelques économies pendant son séjour, comme jardinier, dans la capitale et qu'il en cherchât un placement utile, nous le voyons rechercher, à peine établi chez le père Fritz, quelque coin de terre à bon marché, qui pût lui servir de champ d’expériences agricoles.
Quelles circonstances spéciales l’amenèrent à se décider en fin de compte pour Haslach? C’est ce que nous ignorons ; lui-même n’y venait point alors pour la première fois. Il avait visité, nous l’avons dit, cette vallée pittoresque des Vosges en 1783, et peut-être un souvenir agréable lui en était-il resté. Peut-être aussi, qu’en parcourant la liste des biens nationaux encore à vendre dans le Bas-Rhin, la mise à prix modeste de ce clos de chanoine l’avait-elle particulièrement tenté. Toujours est-il qu’il n’hésita pas bien longtemps dans son choix, car dès le 15 septembre 1797, il devenait l’heureux propriétaire d’une « belle et grande maison, avec Cour, éCu-
1 Ce motif devrait être cependant exclu si réellement, et sans exception, les assignats cessèrent d’avoir cours, même pour l'achat de biens nationaux, en juillet 1796.