Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

82 CORRESPONDANCE DE THOMAS LINDET

la force armée, et la responsabilité des officiers municipaux. Ce décret ne vaut rien en lui-même, il a déjà été changé et il coûtera de longues dissertations.

On crie la sentence de M. de Favras sous mes fenêé-

tres (1). (Papiers R. Lindet.)

XXX VIII. — Aux officiers municipaux de Bernay. Bernay, le 20 février 1790.

Messieurs, la justice enfin a connu du crime de lèsenation. L’aristocratie a fourni une victime. M. de Favras a fait amende honorable et a été conduit au supplice : il a montré de la fermeté. On ne connaît plus que la potence, en attendant que la coupe-tête de M. Guillotin ait été adoptée; ainsi, M. le marquis a été pendu comme un roturier. On a même fait arracher le panache, dont un ami des aristocrates avait couronné l'arbre patibulaire. On a battu des mains sur le passage du malheureux conspirateur ; il faut désirer que ce soit le dernier martyr de l’ancien système. Cependant, je crois que c’est moins le préjugé de la noblesse que l’habitude et le besoin de vivre d’intrigue, qui ont conduit le soi-disant marquis à la Grève. On a douté, jusqu’au moment du jugement, que la justice trouvât, dans la procédure, de quoi l’autoriser à lui décerner la récompense que chacun croyait bien méritée. Il fallait un exemple pour contenirles malveillants; il fallait un supplice légal pour satisfaire le peuple.

On exagère un événement du faubourg Saint-Antoine. On avait saisi, au mois de juillet, des piquets ferrés pour des tentes; on les avait déposés par ordre du district, qui était las de les garder, On avait demandé à les transférer. Le peuple n’a peut-être pas été assez

(1) La sentence condamnant Thomas de Mahy de Favras fut rendue, la compagnie assemblée, à l'audience du parc civil du Châtelet, le 18 février