Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

CONSTITUANTE (22 FÉVRIER 1700) 89

des spéculations qui ne sont pas toujours confirmées par l'événement, — des répétitions, suites immanquables de la nécessité d'écrire à diverses personnes et de l’oubli de ce que j'ai écrit à chacune, — des omissions qui résultent des mêmes causes et des incorrections qui échappent à la précipitation, — des variations que la diversité des circonstances commande; enfin, ce que je n'aurai pas fait, vous voudrez bien croire que je ne l'ai pas pu.

On s'efforce de persuader au peuple qu’il est fàché du supplice de M. de Favras, qu’on l’a immolé à sa fureur, qu’il est mort innocent. Il a montré, dans toute sa procédure, le sang-froid d'un philosophe ou d'un habile scélérat. Ii a fait son amende honorable, il a disserté à l'Hôtel de Ville, il a harangué sur l'échelle avec la fermeté dont les Français donnent rarement l'exemple dans d’aussi malheureuses conjonctures.On cherche à infirmer les dépositions de deux principaux témoins, par la proclamation de l'Hôtel de ville, qui promettait l'impunité et 24,000 livres aux complices qui dénonceraient les trames contre la liberté publique : il est constant que Morel et Torcati avaient fait leur révélation avant la proclamation, et ils n’ont point eu le prix promis aux dénonciateurs. Il est vrai que ces deux particuliers sont des recruteurs, gens dont la probité n'est pas à l’abri de toute atteinte, mais c'était nécessairement dans cette classe que M. de Favras devait chercher des agents : leurs témoignages n'étaient pas parfaitement concordants, mais les dépositions circonspectes des autres témoins ont achevé la conviction.

La banqueroute est l'unique espoir de l'aristocratie : elle emploie tous les moyens pour accréditer l’idée qu’il est impossible de l’éviter. Les malveillants feignent d'y croire : les pensionnaires, réduits provisoirement, y croient fermement. Ils craignent de voir passer le provisoire au définitif, et plusieurs sont fondés à craindre quelque chose de pis. On répand effrontément que, dans toutes les provinces, on ne veut pas payer l'impôt. Il est certain que