Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

42 CORRESPONDANCE DE THOMAS LINDET

de ses sueurs les salaires des offices dont l’inutilité lui serait manifestement connue.

On a induit les peuples en erreur, lorsqu'on les a engagés à signer des mémoires tendant à obtenir l’établissement des districts et des tribunaux judiciaires dans plusieurs lieux qui n’en sont pas susceptibles, ou on usurpe une mission qui n’a pas été déléguée en sollicitant ces établissements pour satisfaire aux demandes formées. Dans le seul département d'Évreux, il aurait fallu accorder un district à Conches, à Nonancourt, à Beaumont-le-Roger, à Pacy, à Vernon, à Lyons, au Pont-del'Arche, à Gisors, ce qui aurait fait quatorze districts et quatorze tribunaux judicaires, pour lesquels il aurait fallu préparer et entretenir des édifices publics et assurer des gages; dans un moment où il faut simplifier l’administration des finances et de la justice, on aurait multiplié à l'infini les administrateurs et les gens de loi.

On dit aux habitants de la campagne qu’ils doivent désirer qu'on les rapproche de leurs administrateurs ; ils n’en seront pas éloignés : les districts ne seront pas plus étendus que ne l’étaient les élections. Les départements le seront moins que les généralités. Les contestations en : matière d'impôts exigeront rarement le déplacement des plaignants ; il sera toujours facile de faire parvenir les mémoires sans frais.

On dit qu’il faut rapprocher les juges des justiciables ; cela est vrai, mais il faut aussi que chaque tribunal présente un cours d’affaires aux magistrats. Si on considère combien le nombre des procès sera diminué par la suppression des droits féodaux et des dîimes, et par la réforme de la procédure; si on veut bien faire attention que les juges de paix, qui seront très multipliés, jugeront ou arrangeront une multitude de contestations, alors on conviendra qu’il serait absurde de prodiguer les contributions des peuples pour former des tribunaux inutiles.

L'Assemblée nationale ne s’est jamais effrayée des