Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

ÉTUDE PSYCHOLOGIQUE 101

rappelés au pouvoir, et à la tête du gouvernement est le ministre de la justice, Danton, qui depuis deux ans personnifie, aux yeux du général feuillant, la démocratie dans toute son horreur.

Il n'en peut croire les premiers avis. Il réclame des explications au ministre de la guerre. Le 13, il donne des ordres à ses troupes pour les rallier à la constitution abolie et au trône renversé, et il entraîne dans le complot qu'il médite la municipalité de Sedan et le directoire du département des Ardennes. Le 14, arrivent au camp trois commissaires de l’Assemblée, Kersaint, Antonelle et Peraldy, chargés de faire reconnaître aux troupes les décisions du pouvoir civil. La Fayette les fait incarcérer à Sedan, par ce motif que, « l'Assemblée ayant été violentée, les membres qui avaient accepté une telle mission ne pouvaient être que les chefs ou les instruments de la faction qui avait asservi l’Assemblée nationale et le roi. » Le coup d’État militaire est commencé. En même temps le général fait rédiger par ses troupes et recueillir des adresses d'adhésion à l’insurrection, et le 15 août, pour compléter l’embauchage, il passe une revue dans la plaine de Sedan. Des murmures répondent à ses allocutions enflammées. A part son petit état-major, les officiers et les troupes dont il veut faire des conjurés lui refusent le serment. Il sent alors lui échapper les volontés dont le concours lui était nécessaire, et son effort s'arrête; il attend. Ainsi Bonaparte, le matin du 18 brumaire, eut un moment de défaillance, et ne fut rassuré que par l’audacieuse effronterie de son frère Lucien. Isolé,

La Fayette se dérobe et « cache soigneusement son départ » (III, 403). D'ailleurs, dès le 15 août 0