Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

116 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

autorisât La Fayette à recevoir quelques lettres ouvertes à titre de papiers publics, et à y répondre sous la surveillance de ses gardiens. Celles qu’il recevait étaient lues par lui en présence du commandant de la forteresse, qui les remportait ensuite. Le lendemain, l'officier revenait avec une feuille de papier, une plume et de l’encre. La Fayette écrivait sous ses yeux. La lettre était remise au commandant de place, qui la transcrivait sur un registre et l’envoyait avec une traduction allemande au conseil de guerre de Berlin. Le gouvernement, après l'avoir examinée et cachetée, la transmettait à l’adresse s’il n'y trouvait rien d’inquiétant, ou la renvoyait au prisonnier pour corrections. (Cf lettre IV, p. 199.) Ces lettres ouvertes sont fort rares. Le tome IV des Mémoires, où se trouve la correspondance de prison, en contient quatre (2 octobre 1793, très mutilée; 27 janvier 1794, interpolée; 6 mars 1794, mutilée; 16 mai 1794). Nous en avons trouvé dix, que nous publions d’après le recueil préparé par Louis Romeuf (lettres III, VIT, VIII, IX, X, XXII, XXIIT, XXIV, XXV, XXX VI).

Cette première lettre ouverte est naturellement adressée par La Fayette à sa femme et précise, avec intention, qu’elle met fin à huit mois de silence (depuis la lettre datée de Coblentz, 16 septembre 1792 ; Mémoires, t. IV, p- 216), afin de laisser croire aux gardiens de la prison que c’est la première fois qu'il écrit. La fermeté du prisonnier s’y affirme par de fortes expressions : « IL vaut mieux éprouver tous les malheurs qu'un remords. » Et il trouve une consolation dans le souvenir de ce qu'il a fait pour servir la cause de l'humanité ; cela est destiné aussi bien aux fonctionnaires qui surveillent sa lettre

qu'aux amis qui doivent la recevoir.

IV. — Les parties que nous rétablissons dans la lettre