Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

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coups de tête qui est bien dans sa nature impulsive, mais qui les eût conduits à une déclaration de guerre. Il ira presque jusque-là dans la lettre XXVIL, si bien faite pour faire ressortir l’inaptitude de La Fayette aux idées com-

plexes et aux difficultés politiques.

XV. —— La lettre du 16 décembre 1793 à M*° d'Hénin est le seul élément existant de la correspondance entre le 10 décembre 1793 et le 3 janvier 1794. Elle offre l’intérèt particulier d'expliquer l'intention qui a fait rédiger et réunir les trois lettres précédentes. Elle signale le progrès des sympathies en faveur des prisonniers français qui se faisaient jour même en Allemagne. Un officier

prussien rapporte à La Fayette un témoignage d'affection

5 de soldats français prisonniers en Allemagne, pour leur ancien général. Un ancien ministre prussien, Hertzberg (lettre XXVIT, p. 277), encourt la défaveur du roi pour avoir blâmé la détention de La Fayette. Le gouvernement de Frédéric enrageait de ces manifestations et redoublait les rigueurs de l’'emprisonnement. Les rois faisaient à La Fayette l'honneur de le châtier de puissance à puissance. Il représentait pour eux un danger européen, « la démocratie royale », la monarchie constitutionnelle. Le vœu de La Fayette était de s’employer, s’il était libre, à établir « une bonne représentation, un bon gouvernement, la liberté fondée sur la vertu et l’ordre légal, ce qui serait aussi avantageux pour Ja France qu’exemplaire pour l'Europe » (lettre XIT), et l’on verrait alors combien la monarchie bourgeoise qui, selon lui, est le type parfait d’un régime de liberté, est différente de la république jacobine. Empècher La Fayette d'être à portée de faire reconnaitre cette distinction par l'exercice du pouvoir ou de l’influence en France, voilà,

selon lui, l'intérêt immédiat de la coalition. Celle-ci ne