Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

138 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

Mais il persiste (lettre XXIV) dans ses soupçons antérieurs ; il croit qu'on veut le faire mourir secrètement; de là les allusions, écrites pour être lues de ses gardiens, à sa santé, qui résiste aux possibilités d’une tricherie de la mort guettant à la grille du soupirail pour le happer.

La lettre XXV est la plus longue de toutes celles qui sont ouvertes. Cela est dû à la complaisance du commandant de Hanff, à qui La Fayette finit par rendre hommage. De Hanff écrivit à M°° d’Hénin sur la page laissée en blanc d’une lettre de La Fayette, et la date de ce billet indique que les formalités administratives dont la prose du prisonnier était l’objet n'avaient pas duré moins de huit jours {lettre XXVT).

Le 16 mai 1794, La Fayette apprenait qu’il allait repasser de la domination de la Prusse à celle de l'Autriche et quitter Neisse pour Olmütz. Vingt et un mois avant, le 25 août 1792, la Prusse le réclamait aux Autrichiens qui l'avaient fait prisonnier à Rochefort; maintenant elle se débarrassait de lui en le rendant à l'Autriche. Il attribue ces changements et la discorde qu’ils annoncent entre les coalisés, aux démarches de ses amis d'Angleterre (lettre XXVIT,. La réalité est un peu différente. Les campagnes de l'hiver de 1793-1794 avaient fait réfléchir la Prusse. Au moment où La Fayette allait quitter Magdebourg pour Neïsse, Frédéric, qui avait le premier porté les armes contre la Révolution, voyait ses troupes repoussées sous Mayence par celles de Hoche vainqueur à Wissembourg. Il commençait à se lasser d’une guerre qui jusqu'alors n'avait profité qu'à l'Angleterre et à la Russie, et allait d’ailleurs le conduire à la journée de Fleurus (24 juin 1794). Il était disposé à se retirer de la coalition et à s'occuper de partager la Pologne. Les réclamations éloquentes de Fox et de Sheridan étaient donc pour peu de chose dans le retour de La Fayette