Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

158 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

attendait. Les Américains en séjour dans la ville ou à bord des vaisseaux des États-Unis se réunirent au consul Pitkern et présentèrent à La Fayette une adresse en anglais qui a été mentionnée, mais non citée, dans les Mémotres (IV, 371). Elle reflète l’opinion de l'Amérique sur la Révolution française à ce moment. C’est parce que depuis cinq ans elle s’est écartée des opinions de La Fayette que la France a passé par toutes les calamités. Dans sa réponse en anglais, La Fayette, se retrouvant sous le drapeau des États-Unis, semble ressentir toutes les émotions de son troisième voyage en Amérique, et ses façons de penser à propos des questions d’ordre politi-

que général sont restées au même point qu’alors. La

O

Révolution française ne lui a rien enseioné; c’est seule-

8 ment dans celle d'Amérique qu’il voit le triomphe de la

liberté et de l’ordre légal.

XLI. — Pendant le voyage d’Olmütz à Hambourg, il avait appris le coup d'État du 18 fructidor (4 septembre 1797). Il s’indigna de ce que, dans cette dernière bataille de l’ancien régime contre la Révolution, il se fût trouvé à la tête du gouvernement deux hommes à lui connus, Rewbell et Lareveillère-Lépeaux, décidés à sauver la République, alors que tout conspirait contre eux pour rétablir « la vraie liberté ». Dans le Directoire, en effet, se rencontraient Carnot, pour faire oublier son passé de conventionnel, et Barthélemy, pour servir la coterie royaliste de la rue de Clichy; à la présidence des Anciens, le royaliste Barbé-Marbois; à celle des Cinq-Cents, Pichegru, dont la trahison était connue depuis cinq mois par Moreau, à la suite de la saisie de documents décisifs dans un fourgon autrichien; enfin, au ministère des affaires étrangères, l’ancien évêque d’Autun, Talleyrand.

La Fayette a déclaré à plusieurs reprises qu'il n'avait