Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)
60 GORRESPONDANCE DE LA FAYETTE
«Un gouvernement libre et vous à la tête, lui disais-je, voilà ce qu'il me faut. » (V, 196.)
Il avait de bonne heure et avec beaucoup de perspicacité jugé le duc d'Orléans et Dumouriez (lettre IV); mais il ne sut pas deviner le génie de Hoche qu'il avait près de lui; il eut toujours confiance en Louis XVI, et dit de lui, le 7 avril 1790 : « On trouvera dans le roi des Français des principes de liberté, de justice, de modération, aussi conformes à son caractère personnel qu'au vœu national, et cette conduite franche et simple qui convient à un roi citoyen. » Même après avoir mentionné les intelligences du roi avec l'étranger, il déclare que cela ne justifie pas la violation de la souveraineté nationale au 10 août : « Le roi ne pouvait nuire, et il comptait exécuter la constitution. » (IV, 175.) La Fayette a même confiance en Léopold II pour terminer en monarque constitutionnel la révolution de la Belgique. « Comme ami de l'humanité et de la liberté, je suis attaché aux monarques qui veulent en devenir l’appui. » (III, 39.) Ilne vit en Mirabeau et Danton que de bas intrigants, et se refusa toujours à leur reconnaitre du génie politique. Il est particulièrement aveugle sur Danton, qu’en 1798 il juge encore ainsi : « Probablement son arrière-pensée depuis le 10 août fut de servir la faction d'Orléans, avec laquelle il avait conservé d’intimes rapports; cependant il eut aussi quelques velléités de rétablir le roi. Il était évidemment dans la conspiration de Dumouriez; mais il est bien sûr que sa première et principale affection a toujours été orléaniste; ce qu’il voulait le moins, c'était la république. » (IV, 140.)
La perspicacité étant une forme intense de l’attention, c'est-à-dire du jugement sous l’action de la