Étude sur les idées politiques de Mirabeau
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qu’elle est organisée en 1789, lui semble le pilier du despotisme. Il songe à la subordonner au pouvoir civil!. Les troupes mercenaires ne doivent être levées que pour la défense du pays et avec le consentement du Corps législatif. Enfin il voulait détruire l’ancienne organisation militaire. Plus ardent que lui, le Courrier de Provence ne répugnait pas à prêcher l’insubordination aux soldats et aux marins. Selon lui, en se révoltant, ils ne faisaient qu'obéir à l'esprit de liberté?.
Le même journal avait pour idéal, du vivant même de Napoléon I", le système militaire anglo-saxon tel qu’il était pratiqué sous le roi Alfred. Mirabeau ne tombait pas dans ces insanites. Lorsqu'il s’agit de réorganiser l’armée, il demanda, avant tout, le respect de deux principes : les troupes ne devaient pas gêner la liberté des citoyens; elles ne devaient pas les ruiner en logeant chez eux®. Il repoussait l'esclavage militaire à la prussienne, la conscription {, le remplacement à prix d'argent comme aux ÉtatsUnis5. Ce qu’il voulait, c'était une milice nationale telle qu’elle existait en Suisse et en Saxef. Le soldat devait avoir pour point d'honneur la défense du pays. Mirabeau déclare défectueux un système politique qui ne donne pas au peuple l’esprit militaire7. Tout citoyen doit être armé, L'ensemble de ces soldats citoyens forme les compagnies nationales $. On en tirera un corps d'élite, destiné à la garde du roi, à la protection des frontières, au maintien de la paix publique”.
En attendant ces grandes réformes, il fallait tirer parti de l’armée telle qu’elle existait alors. Elle était démoralisée par le départ des officiers émigrés autant que par l’esprit révolutionnaire. Mirabeau conseïllait de licencier complètement ces troupes pour les reformer dans de nouvelles conditions. Une fois que le nombre en était fixé par l’Assemblée, le roi devait en prendre le comman-
. Adresse aux Bataves, dans Vermorel, v. Il, p. 156.
. Courrier de Provence, v. VIH, p. 417 et 418; v. IX, p. 458.
. Moniteur. Discours du 25 décembre 1790.
. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 432.
. Lettres de cachet, v. I, p. 183.
. Lettre à Frédéric-Guillaume IT, p. 409. Lettres à Mauvillon, p. 35. . Lettres de cachet, v. I, p. 165 et 166.
. Lettre à Frédéric-Guillaume IT, p. 409 et 418.
. Courrier de Provence, v. XI, p. 514, 527 et 533.
0. Août 1790. Cf. Reynald, p. 285.
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