Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

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à cet aristocrate de naissance. Dès 1791, il était un plébiscitaire inconscient.

Le due de Liancourt fut moins explicite sur le principe de la souveraineté, non qu'il la déniàt exclusivement au peuple ; il disait : « Pour donner une autre forme de gouvernement à la patrie, il faudrait une Convention nationale », et afin de soutenir la sanction royale il invoquait cet argument : « Tous les cahiers ne portent pas qu'il faille détruire la monarchie (1). Il y avait de l’opportunisme dans sa méthode : les députés du tiers ne durent pas se faire de grandes illusions sur les convictions du noble duc en la matière. Parlementarisme et monarchisme tôt ou tard finissent par s’exclure. Au fond de tout parlementaire, inconsciemment ou non, il y a du républicain. Le duc de Liancourt est grand-maître de la garde-robe du roi, ami de Louis X V;le 14 juillet 1791, en pleine assemblée il défendra courageusement l’inviolabité de sa personne; mais dans l’expression même de son courage on le juge sans foi au droit divin eten lasouveraincté royale. Et s’il fallait une preuve de plus de son inclinaison naturelle vers la souveraineté démocratique, je la trouverais dans ce fait absolument extraordinaire pour l’époque. Possesseur de revenus énormes, grand seigneur terrien, c’est lui qui, le 12 août 1789, propose l'allocation d’un traitement fixe aux députés afin que la part de souveraineté attachée à leur personne soit accessible à quiconque il plaira au peuple d’en revêtir.

(1) Séance du mardi 4 septembre 1789,