Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

LES DEUX LA ROCHEFOUCAULD 91

le ‘plus actif de la réformation de l’impôt, le due de Liancourt devenait l'organisateur de l'assistance publique, ou pour mieux dire de l’assistance du pauvre par l’État laïque.

C'était une grave question, la plus grave qu’un État sécularisé eût à résoudre, car qui disait sécularisé ne disait pas antichrétien. La France souffrante, pauvre, devait comme par le passé être secourue par la France valide et riche: seule, la méthode du secours devait changer. À la charité individuelle et volontaire, il fallait substituer la philanthropie collective et obligée, celle qui a nom : charité d'État. Jusqu'’alors les moines, les religieuses avaient été les dispensateurs de la pitié des citoyens. Les biens de mainmorte acçumulés entre leurs mains avaient eu comme destination première le soulagement de la misûre ; mais depuis longtemps ces biens en avaient été détournés et ils alimentaient pour une bonne part les plaisirs des abbés ou des abbesses titulaires. D'ailleurs, l’aide aux deshérités et aux malades constituait un devoir national dont l’exercice devait affecter la bourse de tous les contribuables au lieu d’être laissé à la libre générosité de quelques-uns.

La mise en vente des biens ecclésiastiques, l’incendie des monastères, l'annonce de la dépossession prochaine de ceux qui en touchaient les revenus, avaient subitement raréfié la charité. On ne donnait plus aux portes des couvents fermés ou en ruine. Les misérables étaient éparpillés, les frères mendiants sortaient de partout, parcourant les campagnes,