Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

LES DEUX LA ROCHEFOUCAULD 71

Lui aussi il fait son apprentissage de politique et de philanthrope dans le salon de sa tante, la duchesse d’Enville, à l’école des penseurs, des philosophes, des économistes. Il s’initie à l'œuvre de tous les grands réformateurs de la chose publique, depuis Turgot et Malesherbes jusqu'à M. Necker; car sous le règne de ces hommes qui ont dans le caractère tous les principes de raison et de sagesse éclairée nécessaires au gouvernement de l’État, l'hôtel de la Rochefoucauld ne cesse pas d’être « tout ministériel(1) ».

À l’âge de son cousin, à 22 ans, comme lui il voyage. Il se dirige vers l'Angleterre. Il va y étudier le régime constitutionnel dont il est partout question de doter sa patrie. Il charme Walpole par son naturel. « C’est de tous vos Français, écrit le grand lettré à M+,du Deffand, celui qui me revient le plus; il a beaucoup d'âme et point d'affectation ; il n’aimera point à pratiquer les sots (2). » Ce grand seigneur n'est pas un oisif, c'est un laborieux; il s’est trouvé au-dessous des hommes instruits qu’il a fréquentés « il en a été honteux », et il a repris lui-même son éducation (3).

Il rentre en France au moment où Choiseul est renversé du pouvoir. Il a 23 ans, et l'homme qui est l’es poir de la jeunesse libérale est exilé! Liancourt le suit; il est à ses côtés dans les rues de Paris, lors de

(1) Vie du duc de Liancourt, par Frédéric-Gaétan de la Rochefoucauld, son fils. (Delaforest, libraire, page 18, 1827.)

(2) Lettre du 46 mai 4769.

(3) Fragments des mémoires du duc de la Rochefoucauld Liancourt. (Inédit.)