Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

L112 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

guerre civile reprit dans l'Ouest plus acharnée que jamais.

$ 3. — Telle était la situation au moment où Bonaparte, entouré du prestige de la jeunesse et de la victoire, revint en France et fit à son tour et à son profit un coup d'État, celui du 18 brumaire.

Depuis 1794, l'État ne salariait plus aucun clergé, et les Églises, séparées de l’État, étaient obligées de pourvoir à l’entretien de leurs ministres et aux frais du culte. Il y avait longtemps que les communautés catholiques réfractaires étaient soumises à ce régime ets’en accommodaient. Le clergé constitutionnel, qui avait hérité du salaire de l'État après l’adoption de la Constitution civile et qui aurait dû pâtir davantage de la suppression de ce salaire, avait bien supporté cette épreuve. Ainsi, loin de tuer le catholicisme en France, le régime de la séparation l'avait plutôt vivifié. Il était sorti du creuset de la persécution, épuré et plus désintéressé que jamais ; mais, hélas ! il était divisé en deux camps irréconciliables. Le vœu ardent de la grande majorité des Français était de voir renaitre la paix sociale et la tolérance religieuse, sous le régime de l’indépendance des cultes. M"*° de Staël qui était bien placée pour juger l’état de l'opinion, lappréciait en ces termes”: « À l'époque de l’avènement de Bona« parte, les partisans les plus sincères du catholicisme, après « avoir été si longtemps victimes de l’inquisition politique, « naspiraient qu'à une parfaite liberté religieuse. Le vœu « général de la nation se bornait à ce que toute persécution « cessät désormais contre les prêtres et qu'on n’exigeât plus « d'eux aucune espèce de serment, enfin, que l'autorité ne « se mêlât en rien des opinions religieuses de personne. Ainsi « donc le gouvernement consulaire eût contenté l'opinion en « maintenant en France la tolérance telle qu’elle existe en « Amérique. »

1. Il y avait, en 1797, 40 090 paroisses pourvues de prètres constitutionnels et une cinquantaine d'évêques élus.

2. V. Considérations sur les principaux événements de la Révolution francaise. Liège, 1818, 2° vol., chap. vr, p. 243.