Histoire de la théophilanthropie : étude historique et critique : suivi d'une notice sur les catholiques allemands

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ple), chez qui la vie en Dieu acquiert un tel degré d'intensité et de puissance, des hommes à qui leur conscience révèle Dieu avec une telle clarté, qu’ils ne distinguent plus entre l’action divine et leur activité personnelle, et que, très-sincèrement, très-légitimement aussi, ils affirment que Dieu leur parle, quand c’est leur conscience qui leur parle de Dieu, et vous aurez la genèse de cette idée de révélation, commune à toutes les religions et à tous les cultes.

Que conclure de là pour le sujet qui nous occupe? Qu’aussi longtemps que l’homme manquera de foi en lui-même, dans sa propre nature morale, tant qu’il ne croira pas pleinement à son affinité avec Dieu, à la divinité de l’ordre naturel, à l'autorité de sa conscience suffisamment éclairée par les voies régulières, c’est-à-dire tant qu'il sera moralement, spirituellement mineur, il aura besoin, pour accepter la vérité religieuse, de l’idée d’une révélation extérieure, objective et surnaturelle de Dieu. Mais du jour où se repliant sur lui-même, il se sera reconnu fils de Dieu, en communion naturelle avec son père céleste; du jour où il aura compris, et plus encore senti, que Dieu se révèle dans la nature et surtout dans le monde moral, à qui le cherche avec un cœur sincère, de ce jour, nous pensons que l’homme pourra se passer, s’illefaut, de l’idée d’unerévélation surnaturelle deDieu, et asseoir sa vie religieuse sur le fondement des idées et des faits que sa raison etsa conscience éclairées auront reconnus vrais (1).

À une condition pourtant. C’est qu'en aucun cas, Le besoin auquel répond l’idée d’une révélation surnaturelle ne soit sacrifié : c’est que l’homme ait toujours devant les yeux, toujours présent au cœur le Dieu vivant et vrai, le Dieu avec lequel on peut s’entretenir, selon l’image hardie de l'Écriture, comme un ami avec son ami... C'est que, par un effort constant de l’âme, nous nous tenions toujours près de lui.. à portée d’entendre sa voix;..en un un mot, et pour parler sans images, à condition que nous ne laissions jamais se substituer, dans notre esprit, au Dieu vivant de la conscience, le Dieu abstrait et mort de la froide métaphysique ! que si le Dieu de la conscience venait à s’évanouir, avec

(1) Pécaut, Avenir du Théisme chrétien.