L' École de Mars (1794) : avec une gravure en couleurs

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navaient-ils pas ordre d'indiquer sur la liste de leurs hommes ceux qui savaient lire et écrire ? Ne dut-on pas établir le 5 août dans le quartier de santé une tente d'insiruction où quarante illettrés furent conduits tous les jours, de neuf heures à dix heures et demie du matin, par deux décurions de planton? Mais était-ce la peine d’avoir voté le 15 février précédent une loi qui refusait à quiconque ne savait ni lire ni écrire tout emploi dans l’armée depuis le grade de caporal jusqu’à celui de général en chef?

Bon nombre de ces élèves n'avaient donc d'autre mérite que leur indigence et leur sansculottisme. Ils étaient imbus des préjugés du village. La haine que les instructeurs leur avaient inspirée contre l'aristocratie leur mettait dans la tête des idées absurdes. Ils s'imaginaient qu’une sourde conspiration s'était formée contre eux. Une nuit, des mauvais sujets jetèrent des pierres par-dessus les palissades du camp sur les sentinelles du quartier de santé. Les élèves s’alarmèrent et crurent qu’on en voulait à leur vie ; il fallut que Peyssard fit une proclamation pour les rassurer; « la crainte d’une attaque du camp, disait-il, est chimérique, » et il ordonnait