La caricature anglaise au temps de la Révolution française et de Napoléon

LA CARICATURE ANGLAISE 495

Je prends la plume après cette investigation, croyant à peine nécessaire de m'excuser si je fais un peu de chronologie : la date des principaux dessins est essentielle pour suivre avec exactitude l'évolution des idées.

Il importe avant tout de savoir comment on traite les deux grands libéraux dont la vieille intimité fut brusquement transformée en brouille à mort par les événements parisiens, Burke et Fox. Depuis longtemps la caricature, traduisant le patriotisme étroit et féroce d'une grande partie du public, ne ménageait pas Edmond Burke, et le costumait en défigurant ses idées comme ses intentions. De cet Anglais d'Irlande, aussi Anglais et aussi anglican que possible, elle faisait un Irlandais séparatiste, un jésuite en bonnet carré, un chancelier de l'Inquisition toujours reconnaissable à son long nez et à ses lunettes. Désormais, sans lui témoigner des égards inattendus, elle lui sait gré d’être l'ennemi de la révolution et de Fox. Celui-ci pleure l'abandon du chien Burke à lunettes qui s'en va vers un autre maître, William Pitt. L'auteur de tous ces dessins, Gillray, nous montre aussi « le révolutionnaire athée troublé dans son travail de nuit,» Ce personnage est assis à sa table de travail entre une gravure et une brochure. La gravure, c'est l'exécution de Charles I‘: il ne peut être encore question de Louis XVI, puisque nous ne sommes qu'en 1790. La brochure, c'est le récent sermon du docteur Price,— nous dirions aujourd’hui la conférence, — qu'il a donné devant la « Société de la révolution, » à la louange de la Constituante française. Mais voici qu'au milieu des nuages s'avance quelque chose d'énorme et d'offensif :