La correspondance de Marat

158 LA CORRESPONDANCE DE MARAT

trouvé l’art de nous fermer la porte du sénat, des tribunaux, des directoires, des municipalités. Vous nous déclarez, au nom de la loi, incapables de posséder aucun des emplois auxquels vous nous avez appelés, en vertu de nos droits naturels; et, pour comble d’injustice, vous . allez jusqu’à nous déclarer inhabiles à nommer ceux qui : doivent les remplir, jusqu’à nous dépouiller de notre qualité de citoyens. Votre fameuse déclaration des droits n'était done qu’un leurre dérisoire pour amuser les sots, lorsque vous redoutez leur courroux, puisqu'elle se réduit en dernière analyse à conférer aux riches tous les avantages, tous les honneurs du nouveau régime : ce serait donc en faveur des seuls heureux du siècle que s’est opérée la glorieuse révolution.

Mais quand ce fameux décret qui n’admet d'autre titre aux places que les talents et les vertus ne serait pas devenu dérisoire, il n’aurait point d'application pour nous. Réduits à l'indigence, nous ne pouvons servir la patrie qu'avec nos bras, comme nous la servimes toujours : ainsi, tandis que vous goûterez seuls le bonheur de commander aux autres, nous ne serons jamais appelés qu'à obéir, qu'à consacrer à l'État nos travaux, nos peines, nos souffrances. Pour nous, les avantages de la constitution se bornent donc à nous laisser dans la misère et dans la fange. MaraT.

LIX LETTRE A CAMILLE DESMOULINS: (Juillet 1790)

L'Ami du Peuple à l’auteur des Révolutions de France et de Brabant.

1, L'Ami du peuple, n° 170 (vendredi 23 juillet 1790).