La correspondance de Marat

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revenu de vos transes, vous avez tourné les yeux vers votre ami, laissé seul sous le poignard d'un tribunal de sang; et, pour l’en retirer, vous avez eu recours à un expédient de praticien; mais cet expédient n'est pas fait pour moi. J’ai lu avec soin la feuille prétendue incendiaire, qui à paru sous mon nom. j'en ai pesé chaque article, et je l'ai trouvée dans les principes de la plus saine politique; je dirai même, dictée par la justice et l'humanité : car c’est être juste et humain que de verser quelques gouttes de sang impur pour éviter de répandre le sang pur à grands flots. Je me ferais done un honneur d'en avouer chaque mot, si elle était écrite avec plus de précision et d'énergie. Ma facon de voir n’est pas la vôtre, je le sais; mais je doute que parmi des patriotes de sens, laissés juges de la question, j'eusse un seul désapprobateur. Qui ignore que cet écrit patriotique, dénoncé par un __ homme couvert d’opprobre, n’a été déclaré crime de lèsenation que par des hommes conjurés conire la liberté, par des hommes perdus de vices et vendus à l'iniquité., par des hommes qui se font un jeu de conspirer contre la patrie, et-un devoir d'égorger ses défenseurs les plus zélés? Or, loin de m'offenser de leur anathème, je le regarde comme un brevet d'honneur. Indigné des conspirations toujours renaissantes des préjugés, alarmé par la nouvelle de l'approche des ennemis, et convaineu qu'il nous est impossible d'échapper aux horreurs d’une guerre civile, si nous ne prenons enfin le parti d’abattre les têtes les plus coupables, l’auteur de cet écrit invite le peuple à s'assurer des conspirateurs qui sont au timon des affaires. Puis, épouvanté à l'idée des malheurs qui seraient la suite inévitable de leur triomphe, il lui rappelle que cinq à six cents têtes abattues lui auraient assuré pour toujours repos, liberté, bonheur, et que, pour les avoir épargnées par un sentiment de fausse humanité, il exposera plusieurs millions d'innocents à être massacrés. Proposez cette alternative aux sages qui se piquent le