La correspondance de Marat
LA CORRESPONDANCE DE MARAT 175
me forceront de changer de marche, si plutôt ils ne me livrent à la vindicte publique.
Permettez-moi, monsieur, de jeter un coup d'œil rapide sur la manière dont vous vous justifiez de votre administration. « En rapportant vos propres expressions, vous m'avez « demandé, messieurs, un comple de la recette et de la « dépense, à * commencer du premier mai 17190 : 7e vous « l'ai remis; vous avez chargé votre comilé des finances de « l'examiner; je crois qu'il aurait déjà pu reconnaître s’il « existe quelque dépense ou quelque autre disposition « digne de reproches : cette recherche est la seule qui con« cerne essentiellement le ministère, car l’inspeclion des « titres, la revision des quiltances, sont particulièrement « applicables à la gestion des payeurs, des receveurs et des différents particuliers » : ce qui signifie que, sans s'amuser à vérifier les pièces, vraies ou fausses, le comité des finances doit se borner à examiner si vous avez bien additionné et soustrait; or, soyez-en sûr, monsieur, personne ne s’avisera de douter de votre savoir-faire.
La fin de votre lettre est digne d'observation; la voici : Les inimiliés, les injustices dont j'ai fait l'épreuve, m'ont donné l'idée de la garantie que je viens d'offrir : maïs quand je rapproche celie pensée de ma conduite, dans l'administration des finances, il m'est permis de la réunir aux Singularités qui ont accompagné ma vie ! — Ce n'estpas là, monsieur, soit dit en passant, le langage d’un adminisirateur intact, qui s’est empressé de mettre sous les yeux du publie le fidèle tableau de sa gestion, le ton d’un cœur pur, oppressé de douleur, qui s’enveloppe dans le manteau de son innocence, moins encore celui d’une âme fière au-dessus de la calomnie; mais le ton d’un homme sans
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1. On dira sans doute que le comité des finances s’entendait avec le fripon, pour n'avoir fixé qu'à cette époque la reddition des comptes. (Note de Marat)