La correspondance de Marat

02 LA CORRESPONDANCE DE MARAT

Et puis, était-ce donc PAmi du Peuple, le seul des écrivains patriotes qui n'ait pas varié un instant dans ses principes, ses vues, ses démarches, sa conduite, que vous deviez afficher comme un apostat? Lui, dont le courage n’a jamais molli dans les temps de crise, et dont l'énergie a augmenté avec les dangers; lui, qui depuis vingt-huit mois a sacrifié à la patrie sa santé, son repos, sa liberté; lui, qui pour la sauver s’est enterré lout vivant et qui depuis une année entière défend les droits du peuple la tête sur le billot.

Jeune homme, apprenez qu'après la vérité et la justice, la liberté fut toujours ma déesse favorite, que toujours je sacrifiai sur ses autels, même sous le règne du despotisme et qu'avant que vous en sussiez le nom, j en étais l’apôtre etle martyr. Ouvrez l'ouvrage que j'ai publié à Londres en 1774 sous le titre : Chaînes de l'esclavage (The chains of Slavery) ; parcourez-en la préface, vous verrez que j'ai joué en Angleterre, il y a seize ans, le rôle que je joue en France depuis la révolution. Vous y verrez que, profitant de la réélection du parlement pour engager les Anglais à s’honorer par le choix de leurs députés et à réformer les vices capitaux de leur gouvernement dont j'avais fait une étude profonde, je n’ai pas craint d'attaquer les prérogatives de la couronne, les vues ambitieuses du monarque, les menées du ministère, la prostitution de la majorité des deux Chambres vendues à la cour, et de m'exposer pour le salut du peuple à leur haine et à leur persécution. Un jour vous apprendrez les suites de cette entreprise audacieuse : qu’il vous suffise aujourd'hui de voir que, dans quelque pays que je me trouve, l'humanité, la justice et la liberté auront toujours en moi un apôtre et un martyr!.

Puisque je suis sur ce chapitre, je vous dois encore quelques observations. :

1. Ici se termine la partie de cette lettre contenue dans le numéro 448 e L'Ami du Peuple. Ce qui suit se trouve dans le numéro 449 (jeudi 5 mai 1191), sous le titre : « Suite de la lettre de Jean-Paul Marat à Camille Desmoulins ».