La correspondance de Marat

204 LA CORRESPONDANCE DE MARAT

vous avez entassées sur mon compte, souffrez que je vous rappelle un passage que vous n’auriez pas dû oublier.

« Que n’a-t-on pas mis en œuvre (dites-vous dans votre « n° 34) pour appréhender au corps M. Marat? Et aujour« d'hui encore, pour découvrir sa retraite, on a tenté la « probité des colporteurs... On a fabriqué de faux Marat « pour diffamer le véritable... Comme s’il ne suffisait pas à « ses ennemis de le tenir depuis si longtemps dans une « vraie prison, en l’empêchant de se montrer et de jouir « de la lumière des cieux; encore aujourd’hui on veut « à toute force enfermer au Châtelet le courageux Marat, « cet écrivain trop véridique pour notre malheur, et que « moi-même je me reproche d’avoir, comme le public, aussi « peu cru que la prophétesse Cassandre. »

Je reviens à l’article de votre annonce qui a provoqué cette lettre. « Quoi qu’il en soit, concluez-vous, très redou« table Marat, les patriotes te conjurent de continuer « d’user de la liberté dela presse jusqu’à ce que Chape« lier, Desmeuniers et Malouet aient obtenu le décret pro« hibitif après lequel ce trio soupire depuis si longtemps. » Lecteur sensé, tu crois peut-être que cette apostrophe est dictée par le civisme, qu’elle est sentie, qu'elle a même quelque sens : détrompe-toi, ce n'est que du remplissage pour amener ce vain étalage d'érudition dont l’auteur raffole ; écoute, il va lui-même t’en donner le commentaire : « Je sens bien qu’à peu de choses près, il en est de cette « liberté de la presse parmi nous comme du tribunal de « l’histoire à la Chine. On ne voit pas que ce tribunal si « vanté, qui tient registre jour par jour des moindres « fautes, comme des crimes du despote, ait jamais corrigé « le despotisme chez les Chinois. À en juger par cette « foule de dénonciations contre Motier, Bailly, Montmorin, « de Lessart, Desmeuniers; contre Desterazy, Bouillé, Livarol, Gouvernet, Gelb; on sait bien que Marat n’est guère plus utile à Paris que le président du tribunal de l'histoire à Pékin. » S’ilen est ainsi, pourquoi me faire

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