La correspondance de Marat
222 LA CORRESPONDANCE DE MARAT
LXXXI LETTRE A L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE ‘
(Ostobre 4791)
Aux Représentants du Peuple français.
Pères de la patrie,
Les premiers signes que vous avez donnés de votre existence politique ont laissé percer des sentiments qui étaient d’un heureux augure. Les premiers actes que vous avez fait de votre puissance ont dissipé jusqu’à l'espoir qui reposait au fond de nos cœurs. Mais si vous vous êtes trainés un moment dans la fange par des transports d'idolâtrie pour l'acte anti-constitutionnel, vous vous êtes relevés avec gloire de votre chute; et bientôt pénétrés de la dignité de vos fonctions, vous avez vengé la majesté nationale, en remettant à sa place un prince ingrat et superbe, sous lequel rampaient vos indignes prédécesseurs, qui avait déjà oublié ce qu’il doit aux nouveaux représentants de son souverain, et qui se préparait à les traiter en valets.
Cependant l'œuvre glorieuse de votre civisme est demeurée imparfaite. De perfides suppôts du prince, cherchant à égarer votre vertu, ont osé avancer qu'il forme dans l'État un pouvoir indépendant et égal au vôtre : blasphème politique que vous avez repoussé avec indignation. Pour le proscrire à jamais, et rétablir les droits du peuple qu’il outrage, il vous reste à décréter que le prince ne représente aucunement la nation, «et n’en doit jamais prendre le titre, que lui ont déféré vos prédécesseurs dans les der-
1. L'Ami du Peuple, n° 569 (vendredi 7 octobre 1791).