La correspondance de Marat

232 : LA CORRESPONDANCE DE MARAT

remplir les coffres de l'État, et remettre la nation aux fers. C’est cét exécrable complot qu'ont suivi dès lors tous ses successeurs, et dont le cabinet ministériel, concerté avec le législateur et les principaux fonctionnaires publics, continue à se faire la même ressource, sous prétexte de pourvoir à la disette qu'ils ont causée, et de procurer la libre cireulation des subsistances. Qui plus que vous, monsieur, fut à portée de pénétrer ce ténébreux mystère d'iniquité? Vous, membre de l’Assemblée constituante, devant laquelle furent portées les tristes réclamations des habitants de Vernon, Soissons, Meaux, Orléans, Pierre-leMoutier, Douai, Saint-Omer, ete., victimes des spéculations des agents ministériels et de la barbarie du ministre des finances, du comité municipal des subsistances et du général parisien; vous qui avez dû voir les preuves juridiques de l'innocence des citoyens opprimés, de la scélératesse de leurs oppresseurs, et des efforts du législateur pour étouffer les plaintes des victimes de la tyrannie.

Vous-même, monsieur, venez de voir renouveler sous vos yeux ceshorribles machinations, dans l'affaire d'Étampes, vous-même venez d'être appelé dans le conciliabule des douze, avec le ministre de l'Intérieur, à donner votre attache au départ des satellites chargés d'imposer silence, et de contenir par la terreur les malheureux habitants de cette ville.

La crainte que vous n'eussiez été engagé, sans vous en donter, dans l’odieux projet d’en imposer au peuple, en associant votre nom à ceux des vils sappôts du despotisme, m'a déterminé à vous adresser quelques observations dans un de mes précédents numéros. J'espérais que, jaloux deremplir les devoirs d’un magistrat populaire, d'un père du peuple, d'un philanthrope, d'un bon citoyen, vous vous seriez empressé de dissiper le prestige, de déchirer le voile sur les malversations de Simoneau, et les artifices du cabinet de l'assemblée pour métamorphoser cet agent de famine en martyr des lois, et de réclamer, pour des opprimés,