La correspondance de Marat
LA CORRESPONDANCE DE MARAT 213
armée. À juger de ses desseins par ses déclamations * à la Dumouriez, et son inaction, on peut croire quil n'attend qu’un moment favorable pour conduire nos troupes à la boucherie. Je demande, au nom de la patrie, son rappel et sa destitution : il est temps de mettre, enfin, de la prudence dans nos mesures, et de ne plus confier les forces de l'État à des mains infidèles.
A qui donc confier la conduite de nos forces à la Vendée? A des officiers qui aient du civisme, du jugement, du courage, et, grâce au ciel, il s’en trouve encore parmi nous. Je n’attends rien de la plupart de ceux qui sont à la tête de cette expédition; je les regarde comme des hommes mal intentionnés ou ineptes; car un homme de guerre judicieux n'aurait pas observé deux fois la manière dont les rebelles se battent, sans avoir trouvé le moyen de les faire tous périr à la première rencontre. J’ai communiqué mes vues à un officier de confiance qui en fera part à l’un de nos généraux patriotes. Si je pouvais supporter la route, je m'offrirais pour le mettre à l'exécution : à la tête d’un petit corps de troupes sûres, il est facile d’ensevelir dans un jour jusqu'au dernier des rebelles. Je ne suis pas étranger à l'art militaire, et je pourrais, sans jactance, répondre du succès.
Quelque éminent que soit le danger qui menace la patrie en conservant Biron à la tête de l’armée des côtes de l'Ouest, le danger de conserver Custine à la tête de nos principales armées est beaucoup plus éminent encore. Comment le comité de salut public n’a-t-il pas senti qu’en l'appelant à commander en chef celles du Nord, du Rhin, de la Moselle et des Ardennes, il remettait entre ses mains le despotisme militaire et le sort de la République? Comment a-t-il souffert que ce général se rendit indé-
1. Je suis informé, par des voies très sûres, que Biron déclame contre les anarchistes, les désorganisateurs, les factieux de la Montagne, comme faisait le traître Dumouriez. (Nole de Murat)