La correspondance de Marat

LA CORRESPONDANCE DE MARAT 2

uns de nos philosophes qui ont soin de tirer de l’étranger les livres scientifiques nouveaux avant qu’ils soient exposés en vente en reçurent quelques exemplaires. Ils sentirent . Je coup que je portais à leurs principes. Leur premier soin fut d'empêcher que l'ouvrage ne fût annoncé dans les. journaux; ils empêchèrent ensuite qu’il ne fût introduit en France. L’imprimeur en avait expédié un ballot d'Amsterdam à Rouen. À son arrivée, on le fit déposer à la douane. Il y était retenu depuis treize mois, lorsque je reçus une lettre de mon libraire, dans laquelle il me priait d'employer le crédit de mes amis pour en procurer l’entrée dans la capitale. Je m'adressai à la Chambre de la Librairie. L'officier de semaine prétendit n’avoir aucune connaissance de laffaire dont je lui parlais; mais, après quelques recherches, il me fit entendre que mon livre avait été prohibé. À ces mots je fis éclater ma surprise. Ne pouvant concevoir qu'un ouvrage destiné à combattre le matérialisme püt être réputé dangereux, je lui déclarai que je voulais en connaître les dénonciateurs, et que j'allais présenter un mémoire à M. le garde des Sceaux pour demander l’examen de la Sorbonne. Il chercha à m'apaiser, et me promit sous peu quelques renseignements. Au bout de huit jours j'allai le trouver, et il m’apprit que le ballot devait être renvoyé à Amsterdam. Un an après, j'ai appris que la plus grande partie de l'édition s'était écoulée en Italie et en Portugal. Enfin on en permit l'entrée à Paris: les exemplaires qui arrivèrent furentenlevés en peu de jours, et dès lors on m'en a demandé plusieurs fois la réimpression. Affligé de voir que ces MM. eussent pu représenter comme dangereux un livre destiné à les confondre, et résolu de leur ôter tout prétexte à l'avenir, j'ai mis à la tête une dissertation dans les formes contre les matérialistes. C’est cet ouvrage ainsi retouché et enrichi que j'allais donner à la presse avec l'approbation de la Sorbonne, lorsque j'ai fait votre connaissance, et vous savez que j'en