La correspondance de Marat

LA CORRESPONDANCE DE MARAT 29

toutes parts, et de tous côtés arrivèrent des lettres anonymes à mes malades pour les alarmer sur mon comple. Un grand nombre de personnes, dont l’amitié pour moi est fondée sur l'estime, prenaient ma défense, il est vrai; mais leur voix fut étouffée par lés clameurs de mes adversaires. Tous ces faits sont de notoriété publique.

Les dégoûts inséparables de l'exercice de la médecine m'avaient fait soupirer plus d’une fois pour la retraite du cabinet ; je me livrai donc tout entier à mes études favorites; me serais-je attendu que j'allais me faire une nouvelle source d'envieux!

A peine eus-je passé treize mois dans mon cabinet, que mes Découvertes sur le feu furent complètes. Pour les mettre à l'abri du plagiat, je demandai des commissaires à l'Académie des Sciences. Mais comme elle comptait parmi {ses membres plusieurs philosophes, dont j'avais si fort acquis le droit de me défier, je crus devoir ne m'ouvrir qu’à M. le comte de Maillebois, et je parus comme le représentant de l’auteur.

La curiosité qu’excita parmi les académiciens la vue du fluide igné, ce redoutable agent de la nature, fut extrème. Vous n'en prendrez qu'une faible idée par la lettre que m'écrivit à ce sujet un de mes commissaires, peu de jours avant de faire son rapport. Elle est sous le n° 9. Comparez, je vous prie, le ton de cette lettre avec celui du rapport de l’Académie, et vous reconnaîtrez que la franchise n’est pas toujours le langage des corps scientifiques. Cependant, malgré l’entortillage du style, malgré les réticences insidieuses, malgré les éloges exténués que ce rapportcontient, il en dit assez aux hommes clairvoyants pour savoir à quoi s’en tenir sur l'importance de ma découverte.

Pour que le mérite ne m'en fût pas ravi, j'avais envoyé, sous couvert de M.le marquis d’Arcy et de M. le comte de Nogent, une copie du précis de mon ouvrage à chacune des principales Académies de l'Europe. Les réponses que firent celle de Dijon et celle de Berlin se trouvent sousles

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