La patrie Serbe

LA PATRIE SERBE 141

ils étaient anéantis. Ceux quivivaient encore, assourdis, aveuglés, l'intelligence vacillante, combattaient machinalement, leurs corps continuant à obéir à une idée disparue. Les Turcs surgissaient de partout, on se fusillait en plein visage; il semblait que, du sol fécond, sans cesse sortaient des bataillons oftomans. Les Tures avançaient au pas de charge, une rangée succédait à une autre rangée.

Le 18° régiment, presque détruit, gardait ses débris accrochés à la terre qu'il ne veulait pas livrer, mais malgré le stoïcisme des soldats, la première ligne serbe était prise d’une grande faiblesse.

D'une vigoureuse poussée, le 7 résimentappelé parla clameur des clairons, vola à la rescousse, Vivifiés parce reniort, les Danubiens se jetèrent en avant d'un bond ; leurs canons étant parvenus à se placer, visaient l’ennemi ayec une merveilleuse précision et les légions turques se dissolvaient. Plus de la moitié du 7e régiment fut bientôt allongé dans la boue, mais le crépuscule, en prenant les combattants dans son ombre, ne donnait pas la victoire aux Tures ; dansla mélancolie de cette fin de jour automnale, ils pressaient leurs flots, sans cesse accrus, contre les lignes adverses. Par centaines ils s’écroulaientles uns sur les autres comme des capucins de cartes. Les rouges avenues, coupées dans leurs masses par les traînées flamboyantes des obus, étaient inlassablement fermées par de nouveaux combattants ; une vague bondissait sur la vague précédente, abattue par les artilleurs serbes.

Toujours, toujours le flot montait, les ennemis se touchaient, la mêlée était confuse. Il y eut une bourrasque de flammes, de fer chauffé à blanc, le sol crevé jaillissait en fusées de boue et de pierres; les hommes projetés dans l’espace offraient l'illusion de petites croix lancées