Le Comité de salut public de la Convention nationale

LE COMITÉ ET LA GUERRE 259

à côté des généraux, devait prévenir des frahisons nouvelles;elle avait un but non moins important. Ce que la Révolution redoutait avant tout, c'était le triomphe du militarisme, la formation d’une caste guerrière autonome, d’un pouvoir militaire rival du pouvoir civil, et dangereux pour la liberté. « Le gouvernement militaire, disait Billaud-Varenne, est le pire après la théocratie… L'histoire nous apprend que c’est par là que toutes les Républiques ont péri. » Il craignait, de même que Rosbespierre et Saint-Just, que, sans une main de fer, quelque général, ayant le prestige de la victoire, ne fût tenté d'en abuser.

— « Tu donnes à tes rapportsmilitaires uneemphase et une solennité fâcheuses qui montent la tête des soldats, » disait Saint-Just à Barère. |

— « Cesont les défenseurs de la liberté! »

— « Qui, mais on verra sortir un jour de leurs rangs quelque ambitieux qui tuera celte liberté! »

— «Je ne crains pas l’accomplissement de ta prophétie aussi longtemps que le Comité de salut public existera, et que la Convention nationale maintiendra le pouvoir civil à la hauteur où nous l'avons placé. »

— « Je te le répète, tes rapports sont compromettants pour l’avenir; ne fais pas tant mousser tes victoires! »

La prophétie de Saint-Just devait s'accomplir. Du moins, tant que le Comité de salut public vécut, le pouvoir militaire fut subordonné à la puissance civile; la moindre tentative d'indépendance fut réprimée, et, selon l'expression de Michelet, l'épée trembla devant la loi.

L'action des représentants ne s’exerçait pas seulement sur les chefs, mais sur les soldats, dont ils partageaient les fatigues et les dangers. Ils les félicitaient et les récompensaient de leurs succès. Et quelles récompenses! Point