Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE SEIZIÈME. 449

mieux en rapport avec les anciennes habitudes du pays. Chaque compagnie continue en effet, comme par le passé, à compter daus ses rangs un porte-étendard ou bariaktar, homme toujours expérimenté, hardi, ou même renommé pour quelque haut fait de guerre. Il doit marcher à l’occasion à la tête de sa compagnie, l'entraîner, relever les courages défaillants, honnir les soldats peureux, jeter des bravades à l'ennemi, ou même se précipiter dans les rangs de celui-ci pour forcer ses compagnons à venir défendre leur drapeau. Mais les Monténégrins ont toujours considéré comme une honte si grande la perte d'un étendard', que leur prince peut sans crainte le confier à leur loyauté. Un acte de lâcheté expose du reste celui qui le commet à une si odieuse punition, qu'il ne saurait ensuite vivre dans son pays. Revêtu d’un tablier de femme et le fuseau à la main, on le fait alors défiler devant la troupe assemblée qui le couvre de ses insultes et de. son mépris. En dehors de cette punition infamante, il y a encore pour le soldat coupable, la prison, l'amende (gl6ba) et la réprimande adressée par les chefs ou par le prince Jui-même, et c'est à cette dernière que le Monténégrin est certainement le plus sensible.

Dans les anciennes guerres, tant que l’on n'était pas à proximité de l'ennemi ou sur le territoire de celui-ci, la marche de la troupe s'exécutait pour ainsi dire à volonté : on s'en allait par groupes, sans se soucier souvent d'autre chose que du rendez-vous; mais dès qu'il ÿ avait quelque danger signalé, ou même dès que lon avait passé la frontière on s’éclairait au moyen de vedettes qui,

1 Les fanions des compagnies sont aux couleurs serbes . croix rouge sur fond blanc.