Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

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-à défier ses compagnons en face de l'ennemi, et, s’il fait ses premières armes, à se créer un nom par quelque prouesse dont on gardera le souvenir. Il porte jusqu'au fanatisme l'amour de son étendard et, plutôt que de le voir tomber dans les mains de l'ennemi, il lutte, même sans espérance , ‘jusqu'à la mort. Marcheur infatigable, il se porte dans la même journée à des distances capables de déjouer la tactique de l'ennemi et, s'il en est poursuivi, d’épuiser les forces des meilleures troupes. Accoutumé dès l'enfance à l'usage des armes à feu , il manque rarement son but et, d'autre part, estimant au poids de l'or la valeur de ses cartouches, il ne les sacrifie qu'à coup sûr. Commandé par des capitaines qu'il connaît de longue date et qui du reste n’exercent sur lui leur autorité que d’une façon presque patriarcale, il les aime, les honore et met en eux son entière confiance.

Mais ce qui caractérise surtout le Monténégrin comme guerrier, et ce qui lui conserve sa supériorité sur toute espèce de soldats européens, c’est le sentiment de son individualité, lorgueil de cette indépendance même avec laquelle il accomplit les actes de bravoure les plus audacieux el quelquefois même les plus inconsidérés.

Le gouvernement ne devra donc point, en exagérant sa tendance actuelle, chercher à substituer complétement l'action du commandement à l'initiative particulière. Le soldat disparaissant dans la masse, et perdant en quelque Sorte la responsabilité de ses actes, deviendrait une machine inconsciente, et perdrait l'habitude de ces traits de courage qui avaient auparavant pour mobile les satisfactions de l’amour-propre autant que le dévouement pour le pays. Verser son sang pour ce dernier est pour le Monténégrin un devoir si naturel, qu’il attend à peine le mo-