Le pacte de famine, histoire, légende : histoire du blé en France

DEUXIÈME PARTIE. — CHAPITRE III 113

sont point personnelles, mais regardent le souverain et intéressent tous les François ; que, pour abrèger, je lui adresse, par son envoyé, pour remettre lui-même, cacheté, au Roi, son maître, le plus haut projet, j'ose le dire, qui ait été Conçu depuis l’orieine de la monarchie, afin d'en affermir et perpétuer la constitution, d'en prévenir la révolution dans tous les âges, par un établissement autant nécessaire que glorieux. »

Après avoir écrit sa lettre, SOUpconnaint qu'on veut encore le changer de prison pour prendre ses papiers, il barricade sa porte avec sou lit. Et bien fit-il, car les ministres avaient ordonne de l’enlever mort ou vif, pourvu que l’officier auquel on confierait cette mission ne courût pas de dangers ! « Il étoit chargé de se faire aider, en cas de besoin, par cent quatre invalides, » préposés à la garde du ‘donjon. À onze heures et demie du soir, on vient le chercher; il refuse d'ouvrirsaporte et remet, par l'ouverture du guichet, à l’inspecteur de police, sa lettre adressée au Roi et son plan d'Université loyale ; et ces tyrans qui doivent l'enlever mort ou vif, ne songent pas à enfoncer la porte ; il leur faut du temps pour trouver ce moyen-là, et quand ils l'ont trouvé, les 104 invalides n’y suffisent pas, c'est le prisonnier qui est le maître de la prison. Le récit du siège de sa Cellule dont il fixe la date, tantôt à 1772, tantôt à 1784, est homérique, d’un Homère de Charenton. Il soutient donc un siège contre les geôliers et «les spadassins de la police ordurière: » il jette « une large brique sur l'estomac du premier qui se présente » et qui doitse retirer. Il est remplacé par quatre hommes qui arrivent de front ; au bout de quelques instants, ils s’enfuient, emportant deux des leurs blessés. On le menace alors avec « un fusil non chargé. » Ce fusil non chargé ne peut le réduire. Comme au siège de Troie, la force n'y r'éussissant pas, on essaie d'entrer par la ruse : le cheval de bois est remplacé par une paillasse, derrière laquelle se retranchent trois assiégeants agenouillés. Le Prévôt leur jetté, sur la tête, des briques, sa cruche, son pot de chambre, etc. Les policiers sont obligés de battre en retraite après avoir été couverts d’ordures, dont quelquesunes solides, car l’un d’eux est blessé à la tête. La ruse n'ayant pas eu plus de succès que la force, on tente de le réduire par la famine. Pendant qu'on attend le résultat de ce procédé barbare, le baron de Breteuil et le comte de Vergennes, en comité secret, délibéraient sur son plan d'Université loyale!.…

Il s'attendait à éprouver tous les accès de haine et de fureur de la part des orgueilleux ministres et sachant qu’on en voulait autant à

8