Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma, str. 128

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qu’à satiété, pendant tonte la durée de la Terreur (1).

C'était cette Julie Candeille qui, à ses brillantes qualités d’auteuret d’actrice, joignant une séduisante beauté, avait inspiré une violente passion au conventionnel Vergniaud (2).

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(1) La Gazette nationale, ou Moniteur, le lendemain de la 1° représentation, faisait suivre l'analyse de la pièce de l'appréciation suivante : « Catherine ou la Belle Fermière vient d'avoir le plus brillant succès. Partout on y trouveune imagination romanesque, tendre, bassionnée avec douceur, et l’on voit bien qu'une femme est l'auteur de la pièce.

« Cette femme est Mi Canleille, qui en joue le principal rôle; elle y chante des airs qu’elle a composés, et s'accompagne de la harpe, dont «lle joue très bien: beauté. talent, esprit, elle ne perd aucun de ses avantages, et trouve à les développer tous : le rôle, l'actrice et l'auteur se confondent sans cesse dans les vifs applaulissements qu’elle recoit.

« Les hommes aimeront cette pièce comme ils aiment une femme charmante, les femmes S'y plairont par amourpropre. »

« — ME Candeille, elle-même, descendant sur le théâtre, jou sa propre pièce, La Belle Fermière. Elle transporta le public ravi à cent lieues, à mille de tous les événements, dans un monde doux et paisible, où l’on avait tout oublié, même le danger de la patrie. L'expérience réussit. La Belle Fermière eut un succès immense : Les Jacobins eux-mêmes épargnèérent cette femme charmante qui versait à tous l'opium d'amour, les eaux du Léthé. » (Michelet, Les Femmes de la Révolution.)

— En se mettant ainsi an relief sous un aspect multiple : litièraire, musical et vocal, M" Candeille ne faisait que suivre l'exemple précédemment donné par l'auteur des Veillées du Château, d'Adèle et Théodore, ete. Car, en remaniant les Trois Sultanes, pour les accommoder au théâtre de Trianon, Mr°de Genlis s'y était taillé un rôle très brillant, dans lequel, tour à tour, elle chamait, dansait, jouait du clavecin, de la musette, du tympan et de la vielle!

(2 « Un cœur de femme, faible et charmant, tenait comme enfermé ce cœur de lion de Vergniaud. La voix et la harpe de Mie Candeille, la belle, la bonne, l'atlorable, l'avaient fasciné. Paurre, il fut préféré de celle que la foule suivait. La vanité n'y eut point part, ni le succés de l’orateur, ni ceux de la jeune muse, dont une pièce obtenait 150 représentations.

« Cette femme belle et ravissante, pleine de grâce morale, touchante par son talent, par sa vertu d'intérieur, par sa tendre piété filiale, avait recherché, aimé ce Jaresseux génie qui dormait sur les hauteurs : elle que la foule suivait, elle s'était