Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

LA TERREUR 189

égard aux scrupules de sa maîtresse; et j'ai fait, d’ailleurs, aux principes de notre Révolution tant d'autres sacrifices d’un genre un peu plus sérieux, que celui de deux mille vers n’est pas digne d’être compté. »

Par suite, la servante Paméla devint roturière; son père n’était plus le comte d'Auspingh, mais bien le capitaine d'Auspingh, fier de sa roture :

Et je prouve du moins qu'un simple roturier Peut de Mars, comme un autre, obtenir le laurier (1).

En annonçant à sa sœur, Milady Laure, son mariage avec Paméla, il lui montre son futur beau-père :

Serra. Paméla paysanne Doit faire enfin rougir l’orgueil qui la condamne. Vous voyez ce vieillard qui lui donna le jour :

Il n’est point noble. . . . . . . . . .»6{).

La pièce, ainsi modifiée, fut jouée, le 2 septembre 1793, et applaudie plus vivement encore. « Jamais, est-il dit dans les Mémoires de Fleury, qui rerplissait le rôle de Milord Bonfil, la jeune Lange ne joua Paméla avec plus de sensibilité, plus de grâce, jamais elle ne mit un plus naïf abandon et Jamais aussi je ne la vis plus appétissante à aimer. »

On sait, en effet, que les beaux yeux et la grâce séduisante de la charmante actrice firent sensation dans ce rôle, pour la création duquel elle avait abandonné le théâtre de la République ; on sait aussi que la coiffure, d’une forme toute nouvelle, qu’elle y portait avec infiniment d'élégance et de distinction, eut même le privilège, au milieu des agitations de ce temps, de donner naissance à une mode et de mettre

(1) Acte IV, scène XII. (2) Acte V, scène X.

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