Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

192 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

les principes les plus dangereux étaient professés (1).

Un des organes attitrés des factions les plus avancées, lu Feuille de Salut public, jeta, dès le lendemain, le cri d'alarme en ces termes :

ire « Un patriote a été insulté hier, dans une salle ou les croassements prussiens et autrichiens ont toujours prédominé ; où le défunt VEro, trouva les adulateurs les plus vils; où le poignard qui a frappé Marat a été aiguisé lors du faux Ami des Lois. Je demande en conséquence :

Que ce sérail impur soit fermé pour jamais;

« Que, pour le purifier, on y substitue un club de sans-culottes des faubourgs, que tous les histrions du théâtre de la Nation, qui ont voulu se donner les beaux airs de l'aristocratie, dignes par leur conduite d’être regardés comme gens très suspects, soient mis en état d’arrestation dans les maisons de force;

« Qu’enfin le citoyen François de Neufchâteau veuille bien donner à sa pièce une pente un peu plus révolutionnaire. Voilà le langage du Père Duchène, m'allez-vous dire ; à cela je réponds que c’est celui de la vérité républicaine, et que peut-être ma motion n'est pas loin d’être appuyée. »

(1) C’est à la Société de la Liberté et de l'Egalité, qu'on décida la dénonciation des comédiens du théâtre de la Nation, cette assemblée de Jacobins qu'André Chénier flagellait ainsi de son indignation et de son mépris :

« Que les législateurs journalistes, que les philosophes libellistes, et. qu'avec eux, tous les histrions, galériens, voleurs avec effraction, harangueurs de clubs ou de halles, continuent à me traiter d’'aristocrate, de courtisan, d'autrichien, d'ennemi du peuple. eic., je ne leur réponds qu’une chose : c’est que je serai volontiers pour eux tout ce qu'il leur plaira, pourvu que leurs cris et leurs injures attestent bien que je ne suis pas ce qu’ils sont. Je n’imagine pas d’aussi grand déshorneur que de leur ressembler, et, quelque nom qu'ils me donnent, s'ils ne le partagent point avec moi, je le trouverai assez honorable. » (Journal de Paris, 14 juin 1792.)