Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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198 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

Mais, il dut entrer au théâtre construit récemment, dans la rue de la Loi, en face dela, Bibliothèque nationale, par M'e Montansier, abandonnant la petite salle du Palais-Royal, et inauguré le 15 août 1793, sous le nom de Théâtre National.

Là, ce représentant, au Théâtre-Français, de l’élégance, de la distinction et des grandes manières aristocratiques, en fut réduit à la pénible extrémité de représenter le personnage odieux et repoussant de Marat dans une pièce intitulée : Les Catilinas modernes, d’un nommé Féru fils.

Celui-ci s’y livrait à une glorification de Marat et de ses partisans, ainsi qu’à des attaques violentes contre les Girondins, alors sous le coup de la proscription. L'auteur, dont la santé était chancelante, avait adressé à Molé une épître où se trouvait ce vers :

Ressuscite Marat... tu me rends à la vie (1).

Vraisemblablement l’orage que, depuis longtemps déjà, les Comédiens-Français sentaient gronder sur leurs têtes, ne les effraya que médiocrement en éclatant, et les trouva tout préparés, impassibles etmême animés de cette vieille et inaltérable gaieté française, inséparable du caractère des artistes en général et des comédiens en particulier.

En effet, dans ses Mémoires, M"° Rolland raconte qu’un soir elle entendit, dans les couloirs de la prison,

(1) C’est également vers la même époque, qu'on représentait une pièce intitulée : Busot, roi du Calvados, avec Falaisinette, pour reine, bouffonnerie satirique dirigée contre ces mêmes Girondins et surtout contre le mouvement soulevé en Normandie, sa patrie, par Buzot. Ce dernier, en effet, s'était alors mis à la tête d’un parti s'efforçant de lever des troupes pour renverser la Convention, tentative suivie d’un échec comDee qui entraina la fuite de Buzot et sa mort aux environs

e Bordeaux.