Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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208 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

La mesure rigoureuse décrétée et exécutée contre le théâtre de la Nation, eut son contre-coup en province. En effet, peu de temps après, le conventionnel Tallien, en mission à Bordeaux, écrivait, à la date du 30 novembre 1793, à la Convention :

« Avant-hier, tous les sujets du Grand-Théâtre, au nombre de quatre-vingt-six, ont été mis en arrestation ; nous avons détruit ce foyer d’aristocratie. La veille, la salle de ce spectacle avait été investie au moment où il ÿ avait plus de deux mille personnes; tous les gens suspects qui s’y trouvaient réunis en très grand nombre ont été incarcérés.…. » (1)

C'était le moment où la belle Térézia Cabarrus, marquise de Fontenay, avec ses dix-huit ans et sa beauté radieuse, éblouissante, exerçait une fascination irrésistible sur ce fougueux proconsul de vingtquatre ans, qui l'avait arrachée de la prison de Bordeaux. Elle y avait été jetée, comme suspecte et aristocrate, à son passage dans cette ville, pour aller re-

joindre son père, banquier à Madrid.

À la fin de la Terreur, nous aurons occasion de donner quelques détails intéressants sur l’ex-marquise de Fontenay, devenue, à la suite de son divorce avec le marquis Davin de Fontenay, émigré, la femme de Tallien, et passée à l’état de personnage historique après le Neuf Thermidor.

Plus que jamais, surtout à la suite du rapport de Barère à la Convention et de la décision de cette assemblée, le modérantisme devenait un crime capital en politique.

Il y avait là un sujet tout d'actualité, qui s’imposait naturellement aux auteurs dramatiques, et qu’ils ne se firent pas faute d'exploiter largement.

(1) Journal de Paris du 25 frimaire an II. (15 décembre 1793.)