Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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LA TERREUR

Liberté! si mon luth peut quelquefois te plaire,

Si le républicain de l’entendre est jaloux, J'obtiendrai le plus doux salaire.

Aux lauriers des neuf sœurs je préfère le tien.

J'écris pour être utile et non pour la mémoire.

L'amour de la Patrie est la première gloire,

Et l’on n'a point d'éclat si l’on n’est citoyen.

Voici en quels termes la Gazette nationale, à la date du 27 mars 1794, après l’analyse de la pièce, .terminait sa chronique : « Le cinquième acte est très neuf au théâtre, est aussi très tragique, et prouve dans l’auteur un bien grand talent; ceux qui se plaignent sans cesse de la décadence de la tragédie, parmi nous, doivent l'aller voir pour se consoler. »

Talma, dans le rôle de Néron, fut littéralement sublime. — Au cinquième acte, qui se passe dans un souterrain se prolongeant dans un lointain immense, éclairé par une seule lampe, il osa se présenter pieds nus, dans un habillement misérable.

NÉRON, seul. Je suis seul, les pieds nus, le front enveloppé, Caché sous les lambeaux de l’obscure indigence, Maudit et pousuivi des cris dé la vengeance; Enfin, j'entre en rampant sous ces sombres caveaux, Comme un vil criminel jeté dans les cachots. Oh! Ciel! oh! si jamais je reprends ma puissance, Que de torrents de sang rempliront ma vengeance! Que d’échafauds dressés me paieront mes douleurs! Il faut une victime à chacun de mes pleurs!

Au cinquième acte, Néron est tué par l’affranchi Phaon. Pison s’écrie alors :

Il meurt, il nous dérobe une tête ennemie!

Que son cadavre au moins soit chargé d’infamie, Et jusqu’au sein des mers parle Tibre porté, Purge de tout Néron ce climat infesté !

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