Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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Partout les mots de : Monsieur, Madame sont remplacés par ceux de Citoyen, Citoyenne, le plus Souvent sans nul souci de la prosodie, de la césure et de la rime (1).

Racine, aussi bien que Corneille, subissent également la fatale toilette. Ces deux vers :

Détestables flatteurs, présent le plus funeste Que puisse faire, aux rois, la colère céleste.

ne pouvaient être tolérés; aussi, à ces mots : aux rois on substitue d’abord : à l’homme. D'autres hasardent au peuple ; mais la version officielle, qui prévalut, fut : Que puisse faire, hélas 1.

Toutefois, le dernier mot, sur ce Sujet, resta à un journaliste, qui, assez Spirituellement, présenta la

correction suivante :

Dêétestables flatteurs, présent le plus funeste Que... mais lisez Racine, et vous saurez le reste.

À un moment même, un interdit absolu s’étendit Sur toute une série d'œuvres dramatiques, notam-

(1) Le décret de la Commune de Paris qui avait remplacé la qualification de Monsieur par celle de citoyen, remontait au ?f août 1792, jour où la Commune s'était adjoint Robespierre et Marat. La qualification de Madame était également remplacée par celle de citoyenne. Les domestiques deviennent des officieux et, sur les cartes à jouer, les rois et les reines sont remplacés par des géntes et des libertés.

La consécration de cette dénomination de citoyen eut lieu, pour la première fois, à l’Assemblée nationale, dans la séance du ?1 septembre suivant.

Le président Pétion, répondant à une députation de 150 chasseurs organisés en corps-francs, et jurant sur leurs armes, de ne revenir qu'après avoir triomphé de tous les ennemis de la liberté et de l'égalité, s'exprime ainsi :

« Citoyens, l’Assemblée nationale, confiante en votre courage, reçoit vos serments. La liberté de notre patrie sera la récomL pense de vos efforts. »

Gazette nationale du samedi 22 septembre 1792.) P

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