Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

LA TERREUR 233

Robespierre, Barère et autres Jacobins. Car ceux-ci ne pouvaient lui pardonner, surtout, la profession de foi républicaine placée dans la bouche de Démariste, la mère de Timoléon et de Timophane, profession de foi qui, en réalité, n’était qu’une ardente protestation contre la Terreur :

La tyrannie altière et de meurtres avide,

D'un masque. vénéré couvrant son front livide, Usurpant sans pudeur ie nom de liberté,

Roule au sein de Corinthe un char ensanglanté. Au courage, au mérite on déclare la guerre;

On déclare la paix aux tyrans de la terre;

Et la discorde impie, agitant ses flambeaux,

Veut élever un trône au milieu des tombheaux.

Lé peuple ne veut plus ces indignes entraves ; Songeons que la terreur ne fait que des esclaves, Et n'oublions jamais que sans l'humanité,

Il n’est point de loi juste et point de liberté.

Il est temps d'abjurer ces coupables maximess,

Il faut des lois, des mœurs, et non pas des victimes!

Prendre avec cette chaleur la défense des victimes, c'était faire un pas vers l'échafaud, c'était sacrifier sa vie.

Chénier, qui avait dû abandonner sa demeure, et se dérober aux espions qui le traquaient, eut encore la douleur de voir son frère André périr sur l’échafaud, l’avant-veille du 9 Thermidor qui l’eût sauvé.

L'auteur de Charles IX fut alors réduit au silence, et ne se réveilla que pour donner, vers la fin de 1794, à nos armées, le fameux Chant du départ, cet hymne patriotique, à la popularité duquel contribua puissamment la musique entraînante de Méhul.

Le costume, non plus, ne se trouva pas protégé contre cet envahissement de la tyrannie jacobine, car aucun personnage de comédie, aucuns héros ou héroïnes de tragédie ne pouvaient paraître sur la