Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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246 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

puis le 3 septembre 1793, jour de leur incarcération, c’est-à-dire pendant les onze mois que ces malheureux artistes passèrent, en quelque sorte, entre la vie et la mort : nouvelles sinistres, incessantes, de jugements et d’exécutions ; sous leurs yeux, départs jour: naliers de victimes désignées pour l’échafaud; et, à toute heure, cette pensée terrible, obsédante que, pour eux, il n’y aurait pas de lendemain !

C'était au 13 messidor an IT (1* juillet 1794), que leur jugement avait été fixé par Collot d’Herbois luimême, dans une lettre adressée à Fouquier-Tinville.

Puis, comme jugement signifiait alors condamnation à mort, qu’en outre, l'exécution avait toujours lieu dans les vingt-quatre heures, le 2 juillet, une multitude, encore plus nombreuse qu'à l'ordinaire, se pressait sur les quais et les ponts, avide de voir passer, dans le fatal tombereau, ces comédiens si souvent fêtés, applaudis et acclamés :

Foule encombrant les toits, les seuils, les quais, les [ponts

. Cependant par un kasard presque miraculeux, par une circonstance aussi heureuse qu’imprévue, cette curiosité malsaine et barbare allait être déçue, et la sinistre prédiction de Collotd’Herbois ne devait pas se réaliser.

Voici l'incident, assez curieux, auxquels ils dûrent d'échapper à une mort imminente, et tel qu’il résulte de documents certains. Collot d’'Herbois venait, à la date du 8 messidor an IT (26 juin 1794), d'envoyer le dossier des Comédiens-Français au terrible accusateur public, Fouquier Tinville, avec une recommandation toute spéciale ainsi conçue :

« Le Comité t'envoie, citoyen, les pièces concer« nant une partie des ci-devant Comédiens-Français ; « tu sais, ainsi que tous les patriotes, combien ces