Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

34 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

Les imaginations excitées se donnaient carrière, et l’on mit surtout en avant deux causes : l’opinion politique, l'influence de l'aristocratie, et de plus les jelousies de métier. Il y avait la une certaine vraisemblance. En effet, lesfhgitations et les luttes du dehors avaient un écho prononcé à l’intérieur de la Comédie-Française. Deux partis s'étaient formés, aussi tranchés, aussi disparates qu'à l’Assemblée Constituante, ou sur la place publique.

Mais tandis que la majorité était acquise partout ailleurs à la Révolution, c'était un sentiment peu favorable au nouvel ordre de choses qui régnait au foyer et dans les coulisses.

Les Comédiens ordinaires du roi formaient, dans le monde théâtral, une aristocratie qui, de même que l'aristocratie de naissance, ne voyait pas avec satisfaction tomber ses privilèges. Les pensions de la Cour, les cadeaux, les faveurs, les brillantes représentations à Versailles, devant le roi, la famille royale et tous les grands seigneurs de leur entourage, ces bénéfices, ces splendeurs laissaient des regrets faciles à comprendre.

Ces gentilshommes de la chambre, avec leurs belles manières, si bien transportées sur la scène par Molé et Fleury, avec leurs générosités magnifiques, dont plus d’une de ces dames gardait le souvenir, exerçaient un bien autre prestige que ces bourgeois vulgaires du conseil de ville, Puis, pour être juste, ajoutons que les bienfaits du roi et de sa famille avaient laissé, sans doute, chez plusieurs comédiens, des sentiments d’une reconnaissance honorable. Cependant, entraînés par l’enthousiasme général, les Comédiens-Français avaient, à la date du 26 septembre 1789, oftert 23,000 livres à la patrie.

Parmi ceux qui, moins nombreux, acceptèrent les idées nouvelles avec chaleur, était Dugazon, dont le