Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma, str. 84

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un péril menaçant et grave qui, en éclatant, devait porter une atteinte profonde à ses privilèges traditionnels. Une pétition présentée par La Harpe à l'Assemblée constituante, le 24 août 1790, portait les signatures de : Ducis, Sedaine, Fenouillot de Falbaire, Cailhava, Lemière, Laujon, Chamfort, Mercier, M.-J. Chénier, Palissot, Fabre d'Eglantine, Framery, André de Murville, Vigée, Forgeot de Sauvigny, de Maisonneuve, Beaumarchais, etc.

Elle invoquait les titres des gens de lettres, « ces littérateurs de l'esprit humain, ces initiateurs de la Révolution, » à la reconnaissance de l’Assemblée. Sa conclusion tendait « à l'autorisation absolue, pour toutes troupes théâtrales, de jouer les œuvres des auteurs morts, devenues ainsi propriétés nationales, et à la confirmation de la propriété de leurs pièces aux auteurs vivants ».

Ces prétentions, considérées comme une scandaleuse violation de droits acquis, causèrent un trouble profond, une vive agitation au sein de la Comédie.

Dans un mémoire adressé à l’Assemblée, sous les signatures de Molé, Fleury et Dazincourt, elle soutint qu'ils étaient les seuls artistes pouvant comprendre et interpréter les œuvres des maîtres de la scène. « De quel droit, disaient-ils, les auteurs modernes viendraient-ils attaquer les traités, les conventions faites avec les anciens poètes du ThéâtreFrançais? Sont-ils leurs successeurs ou leurs héritiers? Voici vingt extraits de nos registres, qui démontrent à quels titres nous avons acquis les pièces de notre répertoire. Lisez, Messieurs de la Constituante : Donné à Molière pour les Précieuses ridicules, en plusieurs à comptes, 1,000 livres; 2,000 livres à Pierre Corneille, pour son Atéila, en 1670; donné 2,000 livres à Thomas Corneille, prix fait pour