Lepeletier de Saint-Fargeau et son meurtrier : documents inédits

ET SON MEURTRIER. 9

« Fonctionnaires publics, gardes et gendarmes nationaux, sociélés consacrées à la défense de la liberté et de l'égalité, vous tous, citoyens, que le grand objet du salut de la patrie doit tenir inviolablement réunis, prêtez-vous un mutuel secours pour découvrir, arrêter et faire charger de fers l’infâme assassin; tracez aulour de lui un cercle dont il ne sortira que pour monter à l’échafaud.

« C'est de vous surtout qui, incorruplibles au sein d’une garde contre-révolutionnaire, avez rapporté dans vos départements la haine de la tyrannie et un attachement inaltérable aux droits sacrés du peuple; qui, ayant connu l'assassin, devez ressentir plus profondément encore l’indignation qu'inspire son forfait; c’est de vous que la justice attend le succès des plus actives recherches. Si un tyran, condamné par la justice nationale, a trouvé un vengeur dans un de ses satellites, quel citoyen ne s’empressera pas de concourir à placer sous le glaive des lois l’assassin d'un représentant de la République, victime du devoir pénible qu’il a accompli. »

« Le MINISTRE DE LA JUSTICE. »

Les députés avaient décrété dès l’abord que le corps de Lepeletier de Saint-Fargeau serait déposé au Panthéon et qu'ils assisteraient aux funérailles. On prépara pour le 24 janvier une de ces fêtes de conception toute théâtrale qui plaisaient tant alors.

«À Ja place des Piques, ci-devant place Vendôme, rapporte le procès-verbal de la Convention, les députés se sont rangés autour du piédestal étant au milieu de la place et sur lequel on voyait autrefois la statue d'un roi, renversée par le peuple après la révolution gloriense du 10 août 1792. Au haut de ce piédestal était sur un lit à l'antique le corps de Michel Lepeletier, découvert en grande partie, et sur lequel on voyait la blessure honorable et mortelle dont il a été frappé. Le président de la Convention, monté sur le piédestal, a placé sur la tête de Michel Lepeletier une couronne civique. Ensuite on à chanté une hymne à la divinité des nations. »

Chénier avait réglé l’ordre de cette grave cérémonie; son rapport, dit le journal de Prudhomme, « pouvoit êlre rédigé avec plus de simplicité, d'autant qu'il renferme de belles idées dignes de lantique. » Dans le cortége, bien caracléristique pour ce temps de pseudo: renaissance romaine, on voyait : « une figure de la Liberté portée par des ciloyens; les vêtements ensanglantés de la victime portés au bout d’une pique, avec des festons de chêne et de cyprès ; un groupe de mères conduisant des enfants. » Le journal de Prudhomme en rend comptesans se dissimuler, chose remarquable alors, ce qu’il y avait de froid et de forcé dans ces pompes renouvelées des ancivns âges, En vraie feuille parisienne, il montre avec malice le