Lepeletier de Saint-Fargeau et son meurtrier : documents inédits

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frère aîné de Lepeletier débitant d'un œil sec un discours apprêté, et manquant une ou deux fois de mémoire; se jetant avec des gestes dramatiques sur le corps du défunt, et descendant de l’estrade en se faisant tenir sous les bras. Il malmène fort les autres discoureurs, Verguiaud, Borère et tant d’autres, un volontaire à casque qui prit le sabre de l'assassin «et le fit brandir dans sa main en promettant de venger le forfait. » IL a pourtant un mot d'estime pour un Marseillais à bonnet rouge entouré d'un crêpe qui porta la parole après le frère de Lepeletier. « Le peu que son accent provençal et l’enrouement de la voix permit d’entendre, dit-il, fit regretter le reste. »

On composerait un recueil de quelque étendue, en réunissant les estampes publiées alors, et relatives à Lepeletier. Parmi les pièces qui me sont connues, je citerai une planche, « gravée par le citoyen Poisson, » et représentant dans un double médaillon le célèbre député renonçant à ses titres de noblesse, et distribuant de l’argent à ses fermiers « ruinés par la grêle de 1788. » Decray, Brion, Duplessis-Bertaux, Swebach-Desfontaines, et un anonyme, ont figuré la scène de l’assassinat. Cet épisode et la mort de Pâris se retrouvent dans les détestables illustrations jointes au Journal de Prudhomme. Dans ce dernier recueil, je vois encore gravée la cérémonie des funrailles. Au bas de la planche est écrit : « Jeudy, 24 janvier 1793, le corps du martyr de la liberté, sorti de la maison de son frère, et couvert à demie sur son lit de mort, fut exposé sur le piédestal de la statue de Louis XIV, place des Piques, ci-devant place Vendôme. » Le piédestal porte en lettres lapidaires les paroles attribuées à Lepeletier mourant‘:

JE SUIS SATISFAIT PUISQUE JE VERSE MON SANG POUR LA PATRIE J'ESPÈRE QU'IL SERVIRA À CONSOLIDER LA LIBERTÉ ET A FAIRE CONNOITRE SES ENNEMIS

Viennent ensuite plusieurs portraits, dont un, entre autres, est remarquable par cette légende, qui reflète les sentiments d’indignaLion soulevés par le crime de Pâris : La peine de mort a élé prononcée contre ceux qui, donnant sciement azyle à l’ussassin de Pelletier, se montreroient les complices de son attentât. C'est partager son crime que

1 Ces mots, destinés à être gravés sur la tombe, sont insérés dans le décret de la Convention du 22 janvier. Félix Lepeletier met d’autres paroles dans la bouche de son frère. M. Thiers dit que, blessé à mort, le député de l'Yonne ne prononça que ces seuls mots : « J'ai froid, » et expira peu de temps après. Une relation de l'assassinat donnée dans la Nouvelle Minerve, tome IX, p. 222, comme écrite par un témoin oculaire (t. VIE, p. 291) confirme cette dernière assertion.