Les états généraux en France

876 LES ÉTATS GÉNÉRAUX EN FRANCE.

en vient presque à se brouiller, et tel est l'effet produit en sens inverse de ce que l’on cherche, que, malgré la précaution prise par les députés de Rouen de s’ajourner à trois ans de là, pour constater ensemble les résultats acquis, on n’entendit plus parler, sous ce règne, ni d’assemblée de notables, ni, à plus forte raison, d'Etats Généraux. Faut-il maintenant, si nous nous reportons de 1597 à 1711, et parce qu’à la fin du règne de Louis XIV il plut à Fénelon de discourir sur les États Généraux, faut-il nous arrêter à ce que Louis XIV fit des États Généraux? — Il n’en fit rien. Par conséquent, les États ne purent rien, dans un temps où l'on n'était quelque chose que par le bon plaisir du roi. Sous ce règne, le plus long de notre histoire, on n'entend pas une seule fois parler de convoquer, pour prendre d'eux avis ou conseil, gens d’État ou gens d'Église, nobles, bourgeois ou manants. Il reste, il est vrai, des médailles frappées à l'effigie de Louis XIV, et où l’on peut lire cet exergue : « Rien sans conseil : Nil nisi consilio. » Est-ce une plaisanterie? est-ce une bravade? On pourrait croire que c’est l’un ou l’autre, si l’histoire — et notre histoire en particulier — ne nous apprenait que, même après avoir répudié toutes leurs idées et rompu avec toutes leurs traditions, les peuples se persuadent souvent qu'ils restent fidèles aux traditions et aux idées d’autrefois. Peut-être en est-il de même des rois. Quoi qu'il en soit, nous voici arrivés à l’époque où la royauté, devenue franchement absolue, ne prend plus la peine de compter avec personne; elle se dispense de faire la cour aux représentants d'une na‘ tion qui, en attendant que chez elle l'inverse se produise, semble destinée à perdre le sentiment de ses devoirs, parce qu'elle perd celui de ses droits. Trois siècles durant, la monarchie supporte difficilement les États Généraux; mais elle les supporte, ou, si l’on veut, elleles subit. Elle ruse avec eux, mais avec eux elle compte. L'heure est venue où, méconnaissant les traditions, le roi fait plus qu'aspirer à la toute-puissance, il l’exerce, et dès lors, n'admettant pas qu’il puisse y avoir un pouvoir légitime à côté du sien, il se passe des représentants des trois ordres. . Ceci est logique. Était-ce conforme au droit national? Non. — Etait-ce prudent? — A celte dernière question les événements ont répondu.

Toute erreur porte ses fruits, toute usurpation a sa peine, surtout si elle a eu la loute-puissance. Louis XVI victime innocente, ne payera pas seulement de sa vie les désordres de la Régence ; il payera aussi de sa couronne le pouvoir de Louis XIV, pouvoir sans contrôle et sans frein.

C’est jusque-là qu'il faut remonter, quand on veut trouver le vrai