Les fêtes et les chants de la révolution française

QUATRE-VINGT-DOUZE. 11

sonne en ce jour ne put ignorer la gravité des événements : l’aventure d'Archimède, au siège de Syracuse, dérangé au milieu d’un problème par l'entrée inopinée des ennemis, eût été impossible en 1792.

Pendant ce temps, sur les places, des amphithéâtres avaient été dressés pour recevoir les enrôlements volontaires : une planche posée sur deux tambours servait de table: au pied de l’estrade gisaient deux pièces de canon. Une musique militaire excitait les courages. « La musique n’exécutera que des airs majestueux et sévères », avait dit le cérémonial pour la marche et la proclamation; certains jugèrent que cette musique était « trop savante pour la multitude ». Il est évident que le Ça ira, dont on faisait alors si grand abus, formait à lui seul le fond du répertoire; quant au reste, les marches et pas de manœuvre composés par Gossec et Catel étaient mis à contribution. Pourquoi faut-il que le chant de Rouget de Lisle n'ait été connu à Paris que huit jours plus tard? Quel aspect encore plus héroïque il eût prêté à cet appareil déjà si troublant.

III

Si 1792 n’est pas l’année des hymnes, c’est celle des chansons.

Je n'ai pas à parler ici de la plus illustre de toutes, — la plus illustre qui ait jamais été au monde. J'ai consacré tout un volume à la Marseillaise et à son auteur, et ce n'était pas trop. Mais d’autres, avec de moins hautes visées, n'en n'ont pas moins joui d’une popularité qui exige qu'il leur soit fait place dans une étude sur les chants de la Révolution.

Il faut parler d'abord de « Veillons au salut de l'empire ».