Les fêtes et les chants de la révolution française

QUATRE-VINGT-TREIZE. 111

quelques grandes villes et surtout dans la capitale » et prenant note « de la généralité et de la profondeur d’un mouvement qu'on représentait comme superficiel ». Mais cela ne fait pas qu'au point de vue de la réalisation artistique le culte de la Raison ait rien produit d'intéressant. Devons-nous dire pour son excuse qu'il n'eut pas le temps de donner naissance à des chefs-d’æuvre? Mais l'esprit même dans lequel étaient conçues les cérémonies montre que l’avenir n’en pouvait rien attendre. Ce n'étaient que prêches, discours, paroles. La musique, dont la place est si considérable dans les autres fêtes, n'y joue presque aucun rôle. 11 suffit, pour s’en convaincre, de lire le chapitre que M. Aulard a consacré aux fêtes de la Raison en province : il n'y trouve presque rien à citer en fait de chants: ce qu'il signale de plus remarquable est un Hymne aux grands hommes qui fut chanté à Tours sur l'air : Jeunes amanls, cueillez des fleurs!

A Paris, l'apport de la musique ne fut pas aussi complètement dédaigné : il y avait déjà des traditions établies. et vraiment pas de raisons pour s’y soustraire. Et puis, l'Institut national de musique était là, toujours prêt à se faire entendre, et, par un sentiment bien légitime à cette heure fiévreuse des débuts, désireux d'attirer l'attention sur soi. Une décade exactement après la première fête de Notre-Dame, le 30 brumaire, il donna à Feydeau un grand concert instrumental par lequel il voulut affirmer sa vitalité artistique, — date importante dans l'histoire du Conservatoire, dont ce fut le premier concert. On joua une ouverture et un hymne de Catel, deux symphonies concertantes, dont une de Gossec pour onze instruments à vent (2 flûtes, clarinette, 2 hautbois, 2 cors, 2 bassons, serpent et contreclairon), et, ce qu'il ne faut pas manquer de mentionner,